QUEL TYPE DE FRANCHISE CHOISIR A L'INTERNATIONAL ?
Les 3 formes juridiques de franchise possible
Il faut définir le type de franchise correspondant aux capacités et aux besoins du franchiseur.
A/ la franchise directe
Dans cette hypothèse, on applique le même type de contrat que celui passé habituellement avec les franchisés français. Le franchisé étranger sera assisté directement par le franchiseur français. Dès que le développement du réseau dans le pays d'accueil sera suffisant, le franchiseur mettra en place des équipes destinées à former et contrôler son réseau.
Ce type de franchise est conseillé pour les réseaux souhaitant une expansion mesurée dans des pays proches de la France ayant un système juridique comparable.
B/ la master franchise
Cette hypothèse est plus spécifique à l'exportation des franchises : il s'agit de confier à une personne « locale » la responsabilité du développement du réseau dans le pays d'accueil, ainsi que son animation et son contrôle. Il y a donc 3 parties qui entrent en jeu : le franchiseur, le master franchisé, et le « franchisé junior ».
42 % des implantations à l'étranger se font par la création de master-franchises : Le groupe Monceau Fleurs, Planet Sushi, speedy...
2 contrats sont conclus :
Ce contrat accorde au master franchisé l'exclusivité du développement de la franchise pour un territoire donné, moyennant une contrepartie financière.
c'est un contrat de franchise classique. Le master franchisé concède au junior franchisé l'exclusivité de l'exploitation du savoir-faire du franchiseur pour la fraction du territoire couvert par le contrat de master franchise. Ce type juridique de contrat de franchise est plus systématiquement utilisé pour l'exportation des réseaux de franchise car le franchiseur peut ainsi conclure un contrat de master franchise par pays, dans lequel l'enseigne doit être implantée.
Ce type juridique de contrat de franchise présente des avantages pour le franchiseur français :
Le défi principal à relever concerne l'équilibre que devront atteindre le franchiseur et le master franchisé (et a fortiori, les juniors franchiseurs) : équilibre à trouver entre le maintien de l'identité de la marque du franchiseur, et la diversité indispensable qui devra être introduite afin d'assurer le succès de la marque auprès des différents marchés locaux.
C/ la joint-venture
Pour établir des points de vente sous franchise, le franchiseur pourra notamment vouloir désigner comme franchisé un partenaire de renom ayant déjà une solide expérience dans l'exploitation de points de vente similaires ou constituer avec un partenaire local une entreprise commune ("joint venture") dans un "pays-pilote" avant d'étendre le concept à un groupe de pays comparables.
C'est une forme hybride, qui fait la synthèse des 2 formes précédentes : ce contrat de franchise permet au franchiseur de constituer une société avec son partenaire local.
L'entreprise ainsi créée se charge du développement du réseau, sous le contrôle du franchiseur et de son partenaire local. Un cadre du groupe est également délégué dans la société créée, afin d'apporter une implication plus forte et d'assurer une transmission fidèle du savoir-faire.
Ce type de contrat est souvent conclu par des franchiseurs qui souhaitent s'implanter dans des pays assez éloignés de la France.
LA MISE EN PLACE D'UN RESEAU DE FRANCHISE INTERNATIONALE
Après avoir choisi son mode d'internationalisation, le franchiseur se rapprochera de son partenaire afin de mettre en place et formaliser son projet.
Sur le plan juridique, si beaucoup d'enjeux peuvent être traités par la rédaction de clauses appropriées dans le contrat de franchise, il n'en demeure pas moins que la mise en place d'un accord de franchise entre partenaires de nationalité différente soulève des questions particulières au niveau de l'information préalable du franchisé et de la formalisation du contrat de franchise.
1 - L'information préalable du franchisé:
Dans plusieurs pays, le franchiseur est tenu de fournir à son partenaire franchisé (avant que ce dernier ne s'engage) des informations détaillées et sincères sur son réseau. Ceci peut inclure dans certains cas des informations financières, y compris sur les perspectives de chiffre d'affaires et de résultat des magasins franchisés.
En France cette obligation a été instituée par la loi n° 89-1008 du 31 décembre 1989 connue sous le nom de Loi Doubin devenu article L 330-3 du Code de Commerce :
"toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie un document donnant des informations sincères qui lui permette de s'engager en connaissance de cause".
Les informations requises par cette loi concernent entre autres les évolutions du réseau d'exploitants, une présentation de l'état général et local du marché et des perspectives de développement de ce marché ainsi que la nature et le montant des dépenses et investissements spécifiques à l'enseigne ou à la marque que la personne destinataire du projet de contrat devra engager avant de commencer l'exploitation (Décret n°91-337 du 4 avril 1991 (article 1er)).
Outre les sanctions pénales qui s'y attachent, la violation des dispositions de la Loi Doubin peut justifier la résolution du contrat (avec dommages-intérêts), voire sa nullité (Cass. Com., 7 juillet 2004, n°02-15.950, dans le cas où le défaut ou l'insuffisance d'information a eu pour effet de vicier le consentement du franchisé), ce qui entraînera des coûts substantiels pour le franchiseur, y compris le remboursement, le cas échéant, du droit d'entrée payé par le franchisé.
Outre la France, les pays dans lesquels une obligation d'information préalable du franchisé est imposée ou recommandée sont :
L'Afrique du Sud, l'Albanie, l'Australie, le Brésil, le Canada, la Chine, la Corée du Sud, l'Espagne, les Etats-Unis, l'Indonésie, l'Italie, le Japon, la Malaisie, le Mexique, la Roumanie et la Russie
Des obligations similaires à la Loi Doubin existent également au niveau européen voire international. Ainsi, en vertu de l'article 3.3 du Code de déontologie européen de la franchise (Code de déontologie européen de la franchise élaboré par la Fédération Européenne de la Franchise en 1972 et remis à jour en 2003).
Ces réglementations sont-elles adaptées à un contrat de franchise internationale ?
Compte tenu des sanctions qu'encourt le franchiseur en cas de non-respect des dispositions de la Loi Doubin, la question de son application dans un cadre international se pose avec une acuité particulière.
En effet, s'il est évident que le franchiseur dispose d'informations suffisantes sur son marché domestique, il peut ne pas connaître le marché d'implantation et dès lors, certaines des informations qu'il fournira au futur franchisé risquent d'être peu pertinentes ou vagues.
Par ailleurs, on voit mal l'intérêt qu'il y aurait à protéger un partenaire étranger (souvent un master-franchisé) qui bénéficie déjà d'une expérience importante sur son marché et en connaît donc mieux les particularités que le franchiseur lui-même.
Si le contrat de franchise est soumis au droit français, il faudrait logiquement se soumettre aux dispositions de la Loi Doubin, même en présence d'un franchisé étranger.
Nous recommandons de délivrer une information précontractuelle dans tous les cas, en ayant toutefois conscience que le mieux est l'ennemi du bien : le franchiseur qui délivre un prévisionnel comptable met à sa charge une obligation de résultat, qu'il n'a normalement pas (puisque le franchisé est indépendant).
2- La rédaction du contrat
Comme dans tout contrat de franchise classique, les obligations essentielles des parties se retrouveront dans le contrat de franchise internationale : du côté du franchiseur, il s'agira des obligations relatives à la communication d'un savoir-faire formalisé dans des manuels d'utilisation et constamment remis à jour, l'octroi d'une licence des marques et autres signes distinctifs et la fourniture d'une assistance commerciale et technique au franchisé.
Le franchisé, quant à lui, souscrira a minima des obligations relatives au paiement d'un droit d'entrée et de redevances en échange du droit d'utiliser les signes distinctifs et le savoir-faire du franchiseur, l'utilisation des signes distinctifs du franchiseur dans les conditions prescrites par le franchiseur, le respect des normes imposées par le franchiseur, les informations régulières à communiquer au franchiseur, notamment en matière d'améliorations du savoir-faire.
Au-delà des clauses essentielles, les parties devront traiter des problématiques spécifiques à un contexte international.
Afin de garantir l'homogénéité de son réseau, le franchiseur aura intérêt à imposer à son partenaire des restrictions telles qu'une interdiction d'exercer une activité de franchisé ou de distributeur de produits ou services concurrents.
Toutefois, pendant la durée du contrat, la clause de non-concurrence sera soumise à certaines limitations.
A titre d'illustration, en droit communautaire, la clause de non-concurrence contractuelle bénéficie d'une exemption générale. Ceci présuppose toutefois que le franchiseur ne dispose pas d'une part de marché supérieure à 30% du marché géographique et de produits pertinents, cette part intégrant nécessairement le chiffre d'affaires réalisé par les franchisés sur ce marché. Une telle clause ne peut en principe avoir une durée indéterminée ou dépassant cinq (5) ans (Son renouvellement au-delà de cinq (5) ans exige le consentement exprès des deux parties et aucun obstacle ne doit empêcher le franchisé de mettre effectivement un terme à ses obligations à la fin de cette période de cinq (5) ans).
A défaut de clause de loi applicable, le juge ou l'arbitre ayant à connaître d'un litige entre les parties devra se déterminer en fonction des règles de droit international privé applicables dans son pays, ce qui peut entraîner des incertitudes.
Il pourra utilement se faire consentir un droit de préférence ou de préemption portant sur le fonds de commerce et/ou les titres du franchisé.
Pour les groupes français participant au capital de leurs franchisés étrangers, il conviendra d'être vigilant sur l'application éventuelle de l'article 209B du Code Général des Impôts entraînant la taxation des profits des filiales, détenues directement ou indirectement par le franchiseur, bénéficiant d'un régime fiscal privilégié. Enfin, il sera nécessaire d'optimiser le traitement fiscal des remontées de dividendes.
Les législations de certains pays n'autorisent pas les sociétés étrangères à avoir une participation dans le capital de sociétés locales supérieure à un certain seuil (Par exemple, l'Arabie Saoudite autorise une participation étrangère dans la limite de 50% du capital social du franchisé).
Quelle que soit la formule retenue par le franchiseur, elle devra être mise en œuvre en conformité avec d'éventuelles réglementations applicables en matière de contrôle des concentrations.
La jurisprudence de la CJCE et, en France, la doctrine de la DGCCRF, se penchent sur les conditions dans lesquelles un franchiseur peut exercer une « influence déterminante » sur un ou plusieurs franchisés. L'analyse des décisions rendues jusqu'à présent révèle que les critères généralement pris en compte pour établir une telle influence sont la prise de participation dans le capital du franchisé (même si elle est minoritaire, dès lors que les statuts du franchisé ne peuvent être modifiés qu'avec l'accord du franchiseur) ; l'existence de droits de préemption.
Ainsi, il conviendra d'apprécier, au cas par cas, si lors d'une prise de participation même minoritaire dans le capital du franchisé et compte tenu des droits que confère cette participation, au regard notamment des statuts et/ou du droit local du franchisé, l'opération ne devient pas une concentration, justifiant alors la notification de l'accord aux autorités de concurrence compétentes.
2- l'impérieuse nécessité d'anticiper la fin d'une opération de franchise internationale
Au terme d'une opération de franchise internationale ou en cas de sortie anticipée dans l'hypothèse d'un conflit entre les parties, des questions vont inévitablement se poser, que les parties doivent anticiper dans leur contrat.
1- En cas de master-franchise, le sort des sous-franchisés
Par hypothèse, le contrat de master-franchise conclu entre le franchiseur et le master-franchisé et les contrats de franchise conclus entre ce dernier et les sous-franchisés seront étroitement imbriqués.
Au terme du contrat, privé du droit d'exploiter les signes distinctifs et de bénéficier du savoir-faire du franchiseur voire tenu par une obligation de non-concurrence post contractuelle, le master-franchisé devra répercuter sur ses sous-franchisés les mêmes exigences.
Plutôt que d'anéantir totalement le réseau de franchise constitué par le master-franchisé, le franchiseur pourra néanmoins opter pour une reprise du réseau en se réservant le droit de nouer des relations directes avec les sous-franchisés, qui deviendront ainsi ses franchisés directs.
2- Le sort des contrats périphériques
La cessation du contrat de franchise devrait logiquement impliquer la cessation des contrats satellites qui en constituent le prolongement tels qu'accord d'approvisionnement, contrat d'affiliation à une centrale, accords de services etc. Le contrat de franchise aura normalement pris soin d'assurer son interdépendance avec ces autres contrats, ce qui entraînera leur arrêt simultané.
3 - Le dénouement de la participation
Dans le cas où le franchisé est une entreprise commune entre le franchiseur et un partenaire local, l'échec de la franchise donnant lieu à la résiliation du contrat de franchise devrait logiquement entraîner une situation de "deadlock" aux termes du pacte d'actionnaires et, par voie de conséquence, permettre au franchiseur de se faire racheter ses titres dans l'entreprise commune moyennant une formule de prix déterminée ou d'exiger la dissolution de la société commune.
4 - Le risque d'une indemnisation du franchisé
Comme tout contrat de distribution, si la rupture du contrat de franchise intervient dans des conditions régulières, celle-ci ne devrait donner lieu à aucun versement d'indemnités à la charge du franchiseur.
Toutefois, il conviendra de prendre garde aux dispositions d'ordre public pouvant dans certains systèmes juridiques protéger les franchisés-distributeurs lors de la cessation de leurs relations avec leur franchiseur-concédant, et ce quelle que soit la loi applicable au contrat de franchise
A titre d'exemple, la loi belge du 27 juillet 1961 accorde au bénéfice du distributeur ou franchisé local une indemnité de clientèle pouvant aller jusqu'à deux 2 fois son bénéfice net moyen au cours des deux 2 ou trois 3 années passées et ce, même si le préavis donné par le concédant/franchiseur en cas de résiliation à son initiative d'un contrat à durée indéterminée est jugé suffisant.
La franchise internationale soulève des problématiques qui lui sont propres et qui nécessitent outre une bonne connaissance de cette méthode de développement, une maîtrise des risques particuliers existant dans un contexte international. Consultez-nous. Nous pouvons vous accompagner avec l'aide de notre Groupe Strathémis.