Demande de résiliation du bail sans revendiquer la clause résolutoire : pas de commandement de payer à délivrer
Dans le cadre d’un bail commercial, le défaut de paiement des loyers et charges afférents à l’occupation est sanctionné par une résiliation du bail. Il en est de même pour un défaut de paiement desdits loyers postérieurement à un jugement de redressement judiciaire, le juge-commissaire étant alors saisi d’une demande de constat de résiliation de plein droit du bail. Dès lors, une question se pose inévitablement : le commandement de payer prévu à l’article L.145-41 du Code de commerce, inséré dans le livre II de ce code consacré aux sociétés commerciales, s’applique-t-il également à la constatation de la résiliation du bail telle que prévue aux articles L.641-12 et L.622-14 insérés dans le livre VI traitant des difficultés des entreprises ?
Par un arrêt du 24 novembre 2021, la Cour de cassation apporte une réponse claire : le bailleur qui agit devant le juge-commissaire pour demander la constatation de la résiliation du bail sans revendiquer le bénéfice de la clause résolutoire, n’est pas dans l’obligation de délivrer le commandement exigé par l’article L.145-41 du Code de commerce, les deux procédures étant distinctes et obéissant à des conditions respectives spécifiques.
Les faits en l’espèce sont les suivants : une société locataire de locaux commerciaux donnés à bail par un couple fait l’objet d’un redressement judiciaire converti en liquidation judiciaire par un jugement. Les bailleurs déposent une requête devant le juge-commissaire en constatation de la résiliation du bail sur le fondement des articles L.641-12 et L.622-14 du Code de commerce pour défaut de paiement des loyers postérieurs au prononcé de la liquidation judiciaire.
Ils délivrent par la suite au liquidateur judiciaire un commandement de payer les loyers impayés postérieurs au prononcé de la liquidation judiciaire et l’assignent en constatation de l’acquisition de la clause résolutoire devant le juge des référés. Ce dernier accorde un délai de paiement de quatre mois et suspend les effets de la clause résolutoire.
Constatant que le bail commercial contenait une clause résolutoire, la cour d’appel de Poitiers rejeta dans un arrêt du 14 mai 2019 la demande de constatation de la résiliation de plein droit du bail en retenant qu’il appartenait aux bailleurs, préalablement à l’application des articles L.641-12 et L.622-14 du Code de commerce précités, de délivrer un commandement de payer.
La Haute-Cour casse et annule l’arrêt rendu par la cour d’appel. Elle retient en ce sens que :
Quel est l’intérêt de cette décision ?
La Cour de cassation distingue les fondements de la résiliation du bail et le formalisme obligatoire en découlant pour le bailleur. Dès lors, les juges du fond ne peuvent déclarer les bailleurs irrecevables en leur demande pour ne pas avoir fait délivrer au liquidateur un commandement de payer visant la clause résolutoire.