Cour de cassation, 3e chambre civile, 8 Juin 2017 – n° 16-16.566
Rappel du principe :
Suivant l'article 42, alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965 , « les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions ».
Passé ce délai, les assemblées générales de copropriétaires deviennent définitives et les résolutions votées s'imposent à tous les copropriétaires.
En l’espèce :
Selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 mars 2016), un établissement public de santé a sollicité de l'assemblée générale des copropriétaires l'autorisation de changer l'affectation de ses lots de commerces en hôpital de jour.
Le syndicat des copropriétaires se prévalant du refus de cette assemblée, l'a assigné en cessation de cette nouvelle activité.
L’établissement public fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen :
1°/ que le refus des copropriétaires d'autoriser l'exercice d'une activité dans la partie privative d'un lot de copropriété ne peut avoir pour effet d'interdire l'exercice d'une activité qui n'est pas incompatible avec la destination de l'immeuble ou avec les droits des autres copropriétaires, dès lors qu'une telle activité n'est pas interdite par le règlement de copropriété ;
qu'en considérant que le refus opposé par les copropriétaires à l'exercice d'une activité d'hôpital de jour dans les lots n° 33 et 34 faisait effectivement obstacle, par lui-même, à l'exercice de cette activité, et en s'abstenant en conséquence de rechercher, comme elle y était invitée si une telle activité était compatible avec la destination de l'immeuble, la cour d'appel a violé les articles 8 et 9 de la loi du 10 juillet 1965 ;
2°/ que le fait, pour un copropriétaire, de demander l'autorisation des autres copropriétaires pour exercer une nouvelle activité dans les parties privatives de son lot ne vaut pas engagement unilatéral de ne pas exercer cette activité sans leur accord, sauf volonté non équivoque de renoncer à un tel exercice en cas de refus ; qu'en considérant, pour écarter le moyen tiré de ce que l'établissement public Les Hôpitaux de Saint-Maurice n'avait pas à solliciter l'autorisation de l'assemblée générale pour exercer une activité d'hôpital de jour, que cet établissement s'était, de sa propre initiative, assujetti à l'accord des copropriétaires pour exercer une telle activité, cependant que la demande d'autorisation n'interdisait pas à l'établissement d'exercer cette activité en l'absence de volonté non équivoque d'y renoncer, non constatée en l'espèce, la cour d'appel a violé les articles 8 et 9 de la loi du 10 juillet 1965 ;
3°/ que les défenses au fond peuvent être invoquées en tout état de cause, sans que puisse être opposée au défendeur la règle de l'estoppel selon laquelle nul ne peut se contredire au détriment d'autrui ; qu'en relevant, pour écarter le moyen tiré de ce que l'établissement public Les Hôpitaux de Saint-Maurice n'avait pas à solliciter l'autorisation de l'assemblée générale pour exercer une activité d'hôpital de jour, que cet établissement s'était, de sa propre initiative, assujetti à l'accord des copropriétaires pour exercer une telle activité, la cour d'appel, si elle est considérée comme ayant ainsi opposé à ce moyen de défense au fond la règle de l'estoppel, a violé les articles 72 et 563 du code de procédure civile ;
La décision de la Cour de cassation :
L'établissement public s'était, de sa propre initiative, assujetti à l'accord des copropriétaires pour exercer son activité d'hôpital de jour et la décision de l'assemblée générale refusant ce changement d'affectation n'avait pas été contestée.
Devenue définitive, la décision s'imposait à l'établissement public comme à tous les autres copropriétaires alors même qu'elle porterait atteinte aux modalités de jouissance de leurs parties privatives. La cour d'appel en a justement déduit, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, qu'il n'y avait pas lieu d'examiner si le changement d'affectation contrevenait aux prévisions du règlement de copropriété, si l'activité d'hôpital de jour présentait une utilité sociale ou si elle engendrait des troubles dans l'immeuble.